Son mode de vie brise les stéréotypes. Les journées de Yassine Morjane sont en effet divisées entre deux endroits aux ambiances bien différentes. Leur première partie se déroule au salon Hair Design II, situé à une centaine de mètres de la mairie de Montataire, où il est employé en tant que coiffeur.
Montataire, mercredi. Yassine Morjane dans le salon de coiffure où il est employé. Crédit : Florent Pervillé
Puis, chaque fin d'après-midi, à 18 heures, il quitte son salon pour se rendre dans son deuxième fief, la salle du Boxing Club olympique de Pont, où il exerce, six jours sur sept, son second métier : boxeur. Ce soir (début du gala à 20 heures), à la salle Léo-Lagrange, le poids moyen dispute d'ailleurs son 8e combat professionnel, face au Letton Dmitrijs Ovsjannikovs (6 combats, 2 V, 2 N, 2 D). Si l'image renvoyée par ces deux activités est totalement différente, la représentation virile du boxeur contrastant avec celle bien moins physique du spécialiste du cheveu, l'intéressé porte sa double casquette sans se faire de noeuds au cerveau. « C'est vrai que les gens s'étonnent souvent quand ils apprennent que je suis à la fois boxeur et coiffeur, reconnaît celui qui est passé pro en 2012. Mais pour moi, il n'y a pas de contradiction. Depuis que je suis tout petit, j'ai toujours aimé la coiffure. Et la boxe, j'ai commencé à 14 ans. Ce sont mes deux passions ».
Son entraîneur est aussi son client
De toute façon, chez lui, l'un ne va pas sans l'autre. Il coupe ainsi régulièrement les cheveux de son entraîneur, Giovanni Boggia. « C'est un coiffeur aux doigts de fée, s'amuse ce dernier. Il est très minutieux, très agile, et en plus, comme beaucoup de frappeurs, il a les doigts fins. C'est un super contraste. Sur le ring, évidemment, c'est une autre histoire ». Car, entre les cordes, Morjane décoiffe plus qu'il ne brosse dans le sens du poil. Celui qui a fait toutes ses classes au BCOP est en effet toujours invaincu chez les pros, après sept combats, dont quatre se sont achevés par K.-O.. « La boxe et la coiffure sont deux choses très différentes, confie l'enfant de Liancourt. Pour être boxeur, il faut être un peu fou, y compris par rapport au rythme des entraînements, à l'alimentation. C'est énormément de sacrifices. Quand mon employeur me voit manger une pomme dans la journée, il se dit que je suis fou ! » Une folie qui va de pair avec son ambition. Car ce duel face au Letton est un combat de préparation pour le quart de finale du Tournoi de France, le 28 mars à Issoudun contre Maxime Hodée (Fleury-sur-Orne). Une compétition que le Pontois espère remporter pour pouvoir se classer dans les dix meilleurs de sa catégorie et avoir sa chance pour le titre national détenu par son coéquipier Karim Achour. Et ainsi pouvoir prouver au monde du noble art qu'il est aussi à l'aise avec des gants qu'avec une paire de ciseaux.
Par Étienne Martin
Source : Le Parisien