Le Picard (46 v, 2 d) a battu, par KO technique (10e), le valeureux Italien Marcello Matano (17 v, 3 d), le 18 mai, au Cirque d’Hiver, pour ce qui était une demi-finale mondiale IBF des super-welters. Mais jusque-là, rien ne fut simple.

Dans un antre plein à craquer et logiquement tout acquis à sa cause, le Picard enjambait les cordes du ring fidèle à lui-même, concentré et surmotivé, entonnant la Marseillaise drapeau de la Patrie sur le cœur, son frère brandissant les photos de ses deux amis d’enfance fauchés par des balles dans une cité de Creil alors qu’ils étaient adolescents. On pensait alors que le champion d’Europe des super-welters, qui n’a pas abandonné sa ceinture, réciterait sa participation sans fausse note. Ce qu’il fit magistralement dans… les deux premières reprises. Rapide, varié techniquement, se déplaçant dès qu’il avait touché, il donnait l’impression d’être parti pour un récital au rythme de son bras arrière qui renvoyait alors le Vénitien à ses chères études. D’autant que le visiteur, certes plus trapu mais pâtissant d’un déficit d’allonge, ne travaillait qu’en puissance et était à l’évidence dépassé. Ses coups, le plus souvent des crochets, courts où larges selon la distance à laquelle il se trouvait du Français, étaient amplement prévisibles et donc aisément bloqués.
Titi est son meilleur ennemi
Mais dès le troisième opus, Cédric Vitu se mit quelque peu à déjouer. Au lieu de continuer sur sa lancée, il laissa son adversaire revenir progressivement dans la partie. Comment ? En étant parfois moins actif que lui mais aussi en de découvrant trop fréquemment en sortie d’échanges. Pourtant, dès que le Creillois accélérait et désaxait dans la foulée, il mettait dans le vent son vaillant contradicteur, ouvert à l’arcade sourcilière droite au bout de cinq minutes d’effort.

Mais comme il le reconnaît lui-même, Titi est son meilleur ennemi. Même si son style est d’en découdre les mains basses et qu’il possède la vista et le talent nécessaires pour ce faire, il s’est inconsidérément exposé aux remises et aux attaques de l’Azzuri, lequel a pu bien trop souvent passer sa droite. En attestait l’hématome qui s’était formé sous la paupière gauche de l’Oiséen. Certes, Marcello Matano n’est pas un foudre de guerre. Ses coups à la godille, imprévisibles et guère académiques, n’étaient pas faits pour faire briller un rival de la trempe de Cédric Vitu. Il n’empêche, l’Italien, sans grand génie mais courageux, ne se faisait pas prier pour trouver l’ouverture et exploiter les errements du Picard qui n’étalait que trop sporadiquement sa supériorité technique en enchainant insuffisamment.
Des arguments recevables
Au point qu’il commençait à causer de sérieuses frayeurs à ses supporters et à son camp. Il s’en excusa d’ailleurs au micro à l’issue des débats. Qu’il eut l’immense mérite de conclure en deux temps mais à chaque fois de manière magistrale. En l’occurrence sur un contre du droit de plein fouet au menton à montrer dans toutes les écoles de boxe. Le premier dans le neuvième round, lequel envoya Marcello Matano sur son séant avant d’être compté par l’arbitre. Rebelote dans le dixième. Cette fois, l’Italien, visiblement encore plus sonné, fut arrêté quasi simultanément par son coin et le directeur du combat. La messe était dite.

Cédric Vitu pouvait exulter. Toutefois, il avait la louable lucidité de reconnaître que tout n’avait pas été parfait, loin de là. De fait, avant d’abréger le duel, il était en retard au pointage pour deux juges sur trois. Pour expliquer sa performance contrastée, il invoque des arguments recevables : le besoin de vacances après une saison très chargée et ponctuée d’échéances sans droit à l’erreur, la chaleur étouffante de la salle et le fait que son contradicteur était du genre pesant et pas de ceux qui vous mettent en valeur. Soit. Toujours est-il que le protégé de Malamine Koné est désormais challenger officiel du champion du monde IBF de la catégorie, l’Américain invaincu Jarrett Hurd. Il promet que lorsque le match de sa vie aura lieu, il sera irréprochable. On le croit.
Par Alexandre Terrini
Mise en ligne par Olivier Monserrat-Robert
Crédit photos : Denis Boulanger Presse Sports