Énorme surprise et cruelle déception pour le Français (12 v, 1 d) qui a cédé, à l’usure et par arrêt de l’arbitre (9e), devant l’Ukrainien Petro Ivanov (10 v), le 8 décembre, à Levallois, alors que la ceinture WBC youth des super-moyens était en jeu.


Même si c’est toujours plus facile à dire après qu’avant, ce duel sentait quelque peu le piège. Et le début de la confrontation n’incita pas à penser le contraire. Certes, tout démarra comme d’habitude et donc comme il le fallait pour le héros des gens du voyage. Il avançait imperturbablement, délivrant, comme il sait si bien le faire, des coups lourds et précis, tantôt au corps, tantôt au visage. Il prenait l’ascendant tandis que son vis-à-vis enclenchait la marche arrière mais, faut-il le préciser, en bon ordre. Autre signe avant-coureur : l’Ukrainien, lui aussi invaincu, pliait sans jamais rompre. Il ne se démontait nullement et acceptait le mano a mano à mi-distance, ce qui était déjà, en soi, un mini exploit. Il s’efforçait d’endiguer les assauts du Noiséen en donnant des uppercuts et en passant, ici et là, des crochets. Il y parvenait par intermittence quand bien même ne soutenait-il pas la comparaison en terme de puissance. Qu’importe, oserait-on écrire, car sa formidable résistance et ses phénoménales capacités d’encaisseur faisaient le reste, en l’occurrence, épuisaient - à son insu - le Tricolore qui poursuivant son travail de sape mais, peut-être, sans impulser suffisamment de variations de rythme. Certes, dans le deuxième round, un uppercut au foie avait contraint le pugiliste de l’Est à poser un genou à terre. On crut que ce fut son chant du cygne mais il surmonta la douleur pour repartir gaillardement au front.
Avouons-le, l’affaire semblait cousue de fil blanc…
On ne jurerait pas que Louis Toutin ne tenta pas alors d’en finir, quitte à consacrer beaucoup (trop) de forces dans la bataille. Là encore, il est aisé d’en juger quand on connaît, a posteriori, l’issue des débats. Car, avouons-le, l’affaire semblait cousue de fil blanc… Encore fallait-il, pour cela, rester méthodique. En somme ne pas se jeter, varier les zones de frappe de préférence en martyrisant les flancs du Sieur Ivanov pour ensuite trouver l’ouverture à la face. Dans l’ensemble, Kaway, sans cesse le plus entreprenant des deux, s’y employait et ne confondit pas vitesse et précipitation. Il poursuivait patiemment son œuvre de démolition.


Seul problème, et non des moindres, il se heurtait à un mur, l’Ukrainien donnant la fâcheuse impression de s’accommoder vaille que vaille à la boxe du pugiliste local. Et, à force de s’esbigner, ce dernier commença à son tour, fort logiquement au demeurant, à payer ses efforts consentis durant l’entame du match, sans avoir songé à en garder suffisamment sous le pied. A la recherche d’un second souffle, quelque peu émoussé physiquement, il délaissait insidieusement ses moyens de défenses. Surtout, il réussissait de moins en moins à appliquer à la lettre les consignes de son coach, Joseph Germain, lequel lui demandait, pêle-mêle, de miser davantage sur la vitesse, de désaxer la tête pour ne pas se faire toucher et de lever les mains.
La supplique d’Arsen Goulamirian
Alors que jusque-là, la supériorité de l’ancien champion de France des mi-lourds ne souffrait pas la moindre contestation, l’Ukrainien ayant quasiment été sans cesse sur le reculoir, on sentit le vent tourner à partir de la septième reprise. Son courage et son abnégation avaient permis à Petro Ivanov de tenir et de laisser passer l’ouragan. Des vertus qui devenaient soudainement le terreau d’un scénario impensable. Car comme de bien entendu, tel le Phénix, il renaissait de ses cendres. C’était désormais lui qui prenait l’initiative. Louis Toutin n’avait à l’évidence plus d’essence dans le moteur et ne répondait plus. Ses mains basses le mettaient à portée des crochets de son rival, en particulier de sa gauche à répétition. Le calvaire s’intensifia dans le huitième opus. Lors de la minute de repos, son pote Arsen Goulamirian vint le supplier de « se réveiller ». Mais la messe était dite. Au neuvième round, le Tricolore, plus qu’au bord de l’épuisement, alla au tapis une première fois puis une deuxième, ce qui incita fort justement le directeur de combat à prendre la décision qui s’imposait.


Beau joueur, le vaincu expliqua, au micro de Canal+, avoir été victime d’un point de côté fatal et reconnut sans discussion le succès de son contradicteur. C’est que le panache est la marque de fabrique de celui qui demeure plus que jamais l’un des grands espoirs de la boxe hexagonale.
Par Alexandre Terrini
Mis en ligne par Olivier Monserrat-Robert
Crédit images - Karim de la Plaine