Tlaouziti, la consécration

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Le 2 novembre, dans une ambiance survoltée et devant son public du Gymnase Pierre Scohy, à Aulnay-sous-Bois, Yahya Tlaouziti (14 v, 3 n, 4 d) a détrôné aux points, à l’unanimité des juges (96-94, 96-95, 96-94), le champion de France des welters Yannick Dehez (17 v, 1 n, 1 d). De quoi alimenter bien des discussions à l’issue d’un duel extrêmement difficile à juger.
 
 
Connu pour ses qualités de styliste, ex-champion de France cadet et junior, Yannick Dehez était certes donné favori de ce duel mais il lui fallait dissiper quelques doutes. En l’occurrence, ceux nés de sa première défaite (non comptabilisée dans son palmarès) chez les rémunérés, en WSB, face à Mirko Natalizi, en février dernier, à Rome. Sans compter un forfait sur blessure qui avait alimenté la polémique alors qu’il devait remettre en jeu sa ceinture, cet été, devant le solide Jose Pepe Gomez. Yahya Tlaouziti, lui, sortait de trois revers successifs, il est vrai devant des hommes de valeur (Dylan Charrat, Brice Bassole et l’Anglais Luther Clay). Toujours est-il que le champion évacuait d’emblée les incertitudes en entrant dans le vif du sujet comme il convenait. Il se comportait en… challenger en étant le plus entreprenant. Plus rapide de bras, il déclenchait à distance et réussissait fréquemment à passer sa gauche pour toucher au corps. Et quand il se rapprochait, son coup d’œil l’aidait également à faire la différence, tantôt en uppercut, tantôt avec ses crochets courts. Le Montois avait en outre l’intelligence de désaxer prestement en sortie d’échange ou d’effectuer le pas de retrait qui le mettait hors de portée des ripostes de son opposant.
 
Virtuose de l’esquive rotative et du jeu de jambes
 
Pris de vitesse, moins varié techniquement et trop statique, le Francilien, qui avait une fâcheuse tendance à s’accrocher, ne parvenait pas à faire fructifier le pressing qu’il s’efforçait d’imposer. La faute également à une garde pas toujours suffisamment hermétique. Cependant, il avait le mérite de persévérer dans l’espoir que son plan de bataille finisse par le faire arriver à ses fins. En l’occurrence, marteler sous tous les angles le Sudiste, imposer l’épreuve de force pour le désorganiser et l’obliger à reculer et à se découvrir.
 
 
Pas né de la dernière pluie, le Landais ne tombait pas dans le piège. Ne cessant de tourner pour épuiser l’Aulnaysien et le contraindre à lui courir après, il exploitait à merveille tout l’espace du ring. Le local savait à quoi s’attendre et ne s’énervait pas. Il s’efforçait de mettre en application la consigne de son coin : durcir au maximum les débats. Il y parvenait quelques fois, ne cessant de marcher sur son contradicteur. Même si, dans le feu de l’action, il peinait à le cadrer et donc à enchaîner, son entrain comme son activité donnaient progressivement à ce duel une autre tournure. En effet, à partir de la mi-combat, le Montois, certes virtuose de l’esquive rotative et du jeu de jambes, ce que nul ne conteste, était trop avare de ses efforts quand il s’agissait de remiser avec autorité. Certes, on sentait à chaque instant que l’étendue de sa panoplie pugilistique l’autorisait à faire ce qu’il voulait mais ses répliques sur un coup, voire deux avaient un goût d’inachevé d’autant que son manque de puissance et une propension  à privilégier le mouvement perpétuel sur l’efficacité ternissait quelque peu sa partition. Une parcimonie qui l’empêchait de marquer ce championnat de son emprise. Au jeu du chat et de la souris, le chat du CSL Aulnay manquait de précision et partait fréquemment de trop loin pour croquer à pleines dents la souris du Stade montois. Sauf que, par moments, il parvenait à la coincer dans un coin du carré magique ou contre les cordes et à lui asséner quelques directs qui faisaient mouche.
 
L’ivresse du bonheur, les abysses du chagrin
 
Et, à la longue, on avait plus tendance à retenir les coups de boutoir ponctuels de Yahya Tlaouziti qui, de surcroît avançait constamment, que les enchaînements certes plus élaborés mais trop souvent avortés de Yannick Dehez, lequel avait le tort de ne pas en faire suffisamment pour étayer sa supériorité et de ne pas demeurer dans les mêmes dispositions qui avaient été les siennes dans les premiers rounds. Et, dans les deux derniers, ceux où tout allait se jouer, il laissait davantage venir son vis-à-vis et initier un mano a mono de près. Or, dans cette configuration, c’était, semble-t-il, le Séquano Dionysien qui donnait les coups les plus nets et les plus puissants quand le champion en débitait davantage mais avec moins d’impact quand ils n’étaient pas bloqués. Scénario classique qui complique singulièrement la tâche des juges et génère immanquablement un verdict contesté. Celui qui a désigné l’Aulnaysien vainqueur a plongé toute un peuple dans l’ivresse d’un bonheur incommensurable quand le vaincu, sûr de son bon droit, le visage inondé de larmes d’un chagrin abyssal, s’estimait victime d’une terrible injustice et d’une sentence à la maison. De part et d’autre, les mots n’étaient, en ces instants, plus d’aucun poids.
 
Par Alexandre Terrini
 
Mis en ligne par Olivier Monserrat-Robert

 

 

 

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