Scénario catastrophe pour Nordine Oubaali

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Le 29 mai, à Carson, en Californie, le Français (17 v, 1 d) a cédé sa ceinture WBC des coqs face au vétéran - qui, à trente-huit ans, n’en est in fine pas un - philippin Nonito Donaire (41 v, 6 d), vainqueur par KO (4e). Cela a beau être un pléonasme en boxe, la défaite est des plus cruelles quand bien même obéit-elle à l’implacable loi du sport.

Disons-le d’emblée avec le cœur et la plume, on aime Nordine Oubaali, son panache, sa grandeur, son abnégation, ses qualités pugilistiques, bien sûr, mais surtout cette si louable propension à passer d’abord aux actes et à ne jamais se perdre en paroles superfétatoires. Ce sacré bonhomme avait jusque-là tout vaincu, ses adversaires, la Covid-19, les méandres administratifs pour obtenir un visa afin d’être autorisé à se produire outre-Atlantique, une préparation loin d’être optimale au cœur de la pandémie et les inepties du boxing business qui l’ont empêché de disputer un championnat du monde sur son sol, sous les yeux admiratifs de son public. Pas du genre à se défiler, il a, à chaque fois, accepté sans ciller d’aller conquérir son sceptre puis de le défendre en terre étrangère, qu’importent l’inconfort pour ne pas dire le désavantage de pareille configuration. En toile de fond, un sentiment omniprésent qui entremêle frustration et déception de ne pas bénéficier du soutien et des appuis que ses performances eussent sans le moindre doute amplement mérité.

On se doutait qu’à la fin, le carré magique ne le serait que pour l’un des deux

Cette fois, c’était donc sur la côte ouest des States que le challenge le plus relevé de la carrière de Nino One s’offrait - si tant est que le verbe convienne - à lui. Il avait suggéré l’honneur qui l’habitait d’être là, tout en haut de l’affiche, contre un contradicteur d’un tel rang qu’il espérait bien terrasser pour réaliser son rêve ultime : unifier les titres planétaires. En face, il y avait en effet un tueur à gages, excusez l’expression maintes fois ressassée, champion du monde dans quatre catégories différentes, des poids mouches aux poids plumes. Nonito Donaire et Nordine Oubaali se connaissaient pour avoir déjà mis les gants ensemble, pour avoir le même caractère aussi. Celui qui bannit la forfanterie et l’esbroufe pour faire la part belle au respect, au courage et à la force d’âme qui trace le sillon de la destinée.

On se doutait qu’à la fin, le carré magique ne le serait que pour l’un des deux. L’ancien membre éminent de l’équipe de France amateur, plutôt favori sur le papier, n’ignorait rien de sa lourde tâche : casser la distance pour compenser le déficit d’allonge, se méfier plutôt deux fois qu’une du bras avant chirurgical de son rival, bref, allier esprit d’initiative et vigilance défensive. Les équations sont toujours faciles à poser sur le papier… Le premier round faisait office d’indicateur prémonitoire. Empli de bonne volonté, le tenant avançait, certes, mais ne parvenait guère à toucher, ses coups arrivant en bout de course ou trouvant le vide. On devinait que le challenger, placide, l’attendrait tôt ou tard au coin du bois. Ses remises étaient saignantes et c’était lui qui, tissant sa toile, se mettait à occuper le centre du ring.

Et le vainqueur s’agenouilla au côté du vaincu en signe de déférence

Dans le troisième opus, le sociétaire Top Rank de Bagnolet décidait d’accélérer et de durcir les débats. Du pain béni pour son opposant qui le contrait sévèrement et l’envoyait deux fois au tapis avec son arme fatale : son gauche, en crochet puis en uppercut. Nordine Oubaali se relevait en titubant avec toute la dramaturgie que son immense courage augurait. Il était sauvé par le gong. Mais le sort en était jeté. Il repartait néanmoins au front. Le Philippin l’y guettait sur le pied de guerre, sans se précipiter, pour porter l’estocade finale et envoyer le champion au sol avant que l’arbitre ne mette fin aux débats. S’en suivit une scène poignante : le vainqueur s’agenouillait au côté du vaincu et s’inclinait en signe de déférence pour lui témoigner toute sa profonde considération. Fermez le ban !

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