La soirée a eu beau commencer avec une heure de retard, cela a vite été rattrapé par le nombre de knockouts sensationnels. Retour sur cette soirée dans laquelle "" de Malamine Koné ont tous brillé au sein du magnifique Cirque d'hiver, à Paris.

Comme si vous y étiez !
18h45, place au premier combat des poids moyens prévu en six reprises de trois minutes entre le Français Bilel Jkitou (24 ans, 4-0, 2 K.-O.) et l’Espagnol Yuri Pompilio (32 ans, 8-12-2, 2 K.-O.)
Dans une opposition disputée mais gagnée par décision unanime, Bilel Jkitou a su gérer son combat en vrai matador. Seul problème, il n’a pas achevé le taureau blessé. Passons, Bilel Jkitou s’est distingué par sa puissance et son pressing constant. En fin observateur lors de la première reprise, il a su profiter de la garde basse de son adversaire pour le toucher par de lourds crochets. Mais ce combat fait partie d’un des plus durs de sa carrière chez les rémunérés, nous l’avons ressenti et ce sentiment s’est confirmé avec l’ambiance dans la salle. D’habitude plus festifs, ceux qui ont fait le déplacement pour le soutenir étaient plus à scander toutes sortes de conseils plutôt que de s’émerveiller de sa nette domination menant au K.-O contrairement à leur habitude. Avec ce combat difficile mais plein de maîtrise, Bilel Jkitou peut se rassurer au vu de sa prestation efficace et pleine d’intelligence face à un boxeur qui avait seize combats de plus à son actif et qui n’a rien lâché malgré l’épuisement.
19h25, il est l’heure pour le poids coq Nordine Oubaali (29 ans, 9-0, 6 K.-O.) d’affronter le Mexicain Irak Diaz (11-1-2, 5 K.-O.) dans un combat prévu en dix reprises de trois minutes.
Au vu de l’intensité des coups échangés, ce combat ne pouvait que se terminer par K.-O. Nordine Oubaali s’est imposé par K.-O à la septième reprise après une superbe accélération et un déluge de coups. Nettement plus rapide, Nordine Oubaali a fait un magnifique combat en alternant successivement les changements de rythmes et en variant ces coups à la fois net et précis. Quelque peu dépassé en début de combat, Irak Diaz a su revenir en travaillant à mi-distance après avoir compris qu’il était inefficace de loin. Nous avons assister à de nombreux ping-pong pugilistiques entre les deux boxeurs, ça a été du coups pour coups avec tout de même une domination du français à chaque sortie d’échanges. Dès le deuxième round, on a su que Nordine Oubaali pouvait faire tomber le mexicain. Par sa volonté d’aller de l’avant même touché, Iran Diaz a rendu ce combat alléchant. Le chasseur Nordine Oubaali ne s’est pas jeté sur sa proie blessé à l’œil gauche. Il a su attendre le bon moment par divers retraits du buste et accélérations pour l’envoyer définitivement au tapis.
20h25, place au direct sur l’Equipe 21 avec comme combat d’ouverture celui du jeune prodige des poids moyens Louis Toutin (18 ans, 2-0, 2 K.-O.) opposé à son compatriote Steven Crambert (24 ans, 4-2, 2 K.-O.) prévu en six reprises de trois minutes.
Steven Crambert a tenu trois reprises face au protégé de Malamine Koné, véritable diamant brut. Par rapport à ses deux combats précédents, on a pu voir chez Louis Toutin une boxe beaucoup plus structurée. Steven Crambert s’est très bien défendu face aux trois accélérations de Toutin, mais par sa garde trop serrée il n’a pas pu boxer comme il l’entendait. Toujours avec un temps de retard, il paraissait compliqué pour lui de continuer le combat. Un crochet gauche foudroyant en pleine mâchoire a eu raison de lui. Encore une magnifique prestation de Louis Toutin dans une ambiance explosive avec les gens du voyage, lui qui en est le représentant avec son aîné, Marvin Petit. Son adversaire a été ovationné par l’ensemble du Cirque d’Hiver pour avoir tenu « aussi longtemps », première fois que Toutin boxe au-delà du premier round, et également pour l’avoir touché d’un uppercut et d’une droite. Toutin, à qui le tour ?
C’est désormais à Hassan N'Dam N'Jikam (32 ans, 32-2, 18 K.-O.), vainqueur du grand tournoi des poids moyens en 2008 dans ce même lieu, de combattre contre le Polonais Robert Swierzbinski (16-5-1, 3 K.-O.) dans un combat prévu en huit reprises de trois minutes.
Il n’aura fallu que deux petits rounds pour qu’Hassan N’Dam fête victorieusement son retour au sein du Cirque d’Hiver. Il aurait voulu boxer plus pour retrouver ses sensations sur le ring, quelque peu absentes lors de son grand retour en France au Palais des Sports Marcel Cerdan de Levallois, mais une blessure profonde à l’arcade gauche de son adversaire a eu raison de lui. Malgré cela, on a pu voir sur le peu de temps qu’il nous a été offert un Hassan N’Dam très bien en jambes, sautillant et virevoltant autour du polonais. Par ses coups lourds et précis, il a très tôt ouvert l’arcade sourcilière gauche de son adversaire qui a rendu ensuite peu de coups. Après arrêt du combat par l’arbitre suite à la décision médicale, Hassan N’Dam reste invaincu au Cirque d’Hiver, sa deuxième maison.
21h20, place au championnat européen pour le titre EBU vacant des mi-lourds entre le français Mehdi Amar (33 ans, 32-4-2, 16 K.-O.) et l’Italien Serhiy Demchenko (36 ans, 16-9-1, 12 K.-O.). Comme le veut le règlement de la fédération européenne, ce combat est prévu en douze reprises de trois minutes.
Mehdi Amar a été sacré nouveau champion européen des mi-lourds par décision unanime après une longue absence des rings et une blessure à la main. Face à un adversaire très peu agréable à observer, manquant cruellement de style et limité dans ses coups, Mehdi Amar a les outils pour l’envoyer au tapis de manière définitive. Cela s’est ressenti au cours de la deuxième reprise après une erreur de chronométrage, l’italien assis dans son coin n’était visiblement pas préparé à reprendre et a été au bord du K.-O. Comme l’Italien ne « faisait pas le combat » c’est-à-dire ne déclenchait pas en premier et attendait le contre pour boxer lourdement, Mehdi Amar s’est beaucoup investi en allant de l’avant et en le provoquant les bras le long du corps. Il s’est même quelque fois amusé de lui avec une garde inexistante, ce qui n’a pas manqué de nous effrayer, risques inutiles puisqu’il était devant. Mehdi Amar a ouvert son adversaire sous l’œil gauche mais ça ne l’a pas stoppé, acculant le français dos aux cordes en fin de sixième reprise. Le travail psychologique entrepris par Mehdi Amar a fini par payer après que ce dernier ait fait le tour complet du ring en sautillant. Placés près du coin de l’Italien, nous avons vu celui-ci revenir la tête baissée et le regard dans le vide à la fin de la septième reprise. Envoyé au tapis par un bras avant de Medhi Amar, l’italien a contesté le fait que l’arbitre le compte alors que celui-ci a prétendu qu’il avait glissé. Comme à la deuxième reprise, Serhiy Demchenko a été de nouveau sauvé par le gong après une accélération fulgurante de Mehdi Amar. A nouveau pris dans un tourbillon de coups, on s’est demandé comment faisait-il pour rester debout. Malgré les coups encaissés, il est resté dangereux et il nous l’a prouvé en touchant Amar par deux jabs en fin de neuvième reprise et en dictant son rythme lors de l’avant dernière reprise. L’ultime reprise a été disputée entre les deux boxeurs, avec en premier lieu une domination de l’italien qui a réussi à enfermer Amar dans les cordes mais qui a été ensuite renversé par de belles esquives du français, preuve de sa lucidité, et par un crochet qui n’a pas manqué de lui faire tomber son protège dents. Avant d’obtenir cette ceinture EBU tant convoitée, Medhi Amar a proposé à son compatriote Hakim Zoulikha sa première défense qu’il a immédiatement acceptée. Si les deux Français ne reviennent pas sur leurs paroles, il ne reste plus qu’à Malamine Koné d’organiser ce championnat d’Europe franco-français.
22h50, le Lion Rénald Garrido entre sur le ring avec les tam-tam et sa fameuse tête de Lion pour faire face à son compatriote Chaquib Fadli pour le titre national vacant des super-légers dans un combat prévu en dix reprises de trois minutes.
Rénald Garrido a été sacré champion de France par arrêt de l’arbitre à la quatrième reprise après un rythme intense que son adversaire n’a pas pu supporter. Dès le début, Rénald Garrido a imposé son rythme à Chaquib Fadli qui paraissait peu sûr de lui, peut-être déconcerté par la fougue et par la rage de vaincre du Lion de Marseille. Pour les spectateurs qui ne connaissaient pas Chaquib Fadli, ils ont pu le prendre pour un boxeur inexpérimenté, alors que ce n’est pas le cas, loin de là ! Double champion de France par arrêt de l’arbitre, il était un client sérieux pour ce titre national. Mais hier soir sur le ring, il est passé à côté de son combat et c’est d’autant plus difficile quand on fait face à une boule de nerfs qui ne vous lâche pas. Envoyé au tapis une première fois après une série unilatérale de coups alternés corps/tête, il s’est relevé difficilement. On entend même dans son coin : « Si tu veux pas boxer, tu me le dis et on arrête ! ». Conscient qu’il est en train d’écrire son histoire, Rénald Garrido n’a pas lâché son adversaire d’une semelle. Soutenu par les tam-tams, muets depuis le début du combat, le Lion a provoqué Chaquib Fadli en jouant des épaules tout en sautillant et en le touchant par un large crochet gauche. Son adversaire n’a pas récupéré, il a sautillé et a monté sa garde en espérant passer cette deuxième reprise extrêmement difficile pour lui. Un nouveau lot de coups toujours aussi variés s’est abattu sur l’ancien champion de France qui est parvenu tout de même à regagner son coin. Rénald Garrido, réputé boxeur au grand cœur mais qui prend souvent bien trop de coups, nous a prouvé hier soir le boxeur qu’il est aujourd’hui : sûr de lui, affûté, destructeur et avec cette rage de vaincre. Saoulé de coups, Chaquib Fadli n’a rien pu faire, il a même envoyé une droite sur l’épaule de l’arbitre après que ce dernier l’ai séparé de Garrido, preuve de son manque de lucidité. Cette carence s’est immédiatement ressentie après un second envoi au tapis suite à un crochet envoyé en pleine mâchoire. Encore debout mais sonné, l’arbitre l’a arrêté après une nouvelle tornade de coups. Quelle progression de Rénald Garrido au cours de sa saison 2015/2016. Après avoir vaincu le britannique Bradley Saunders chez lui, s’être fait voler par l’arbitrage en Espagne contre le russe Aslanbek Kozaev et avoir fait tomber l’invaincu Daouda Sow en mars dernier, il s’offre ce magnifique titre de champion de France après avoir échoué une première fois contre Franck Petitjean.
23h20, place au combat des poids légers féminin de la soirée entre la Française Maiva Hamadouche (26 ans, 12-1, 10 K.-O.) et la Colombienne Enis Pacheco (28 ans, 15-3-2, 7 K.-O.) pour le titre WBC-Silver prévue en dix reprises de deux minutes.
Maiva Hamadouche nous a régalés après le titre de champion de France de Rénald Garrido obtenu avant la limite. Par une entame de combat aussi fulgurante que son compatriote, la colombienne a été un véritable punching-ball. Piquée par de belles droites et de beaux crochets gauches, il nous a paru compliqué qu’elle puisse aller à la limite. Le travail précis de Maiva Hamadouche a été impressionnant, elle a touché quand elle voulait et où elle voulait. A chaque accrochage subi, elle a tout fait pour s’en défaire au plus vite et retoucher immédiatement. On a senti dans son regard et dans sa manière de boxer une envie d’abréger au plus vite ce combat pour toucher un peu plus du doigt une nouvelle chance mondiale. Après avoir été cadré dans son coin par un travail parfait de Maiva Hamadouche, Enis Pacheco a été arrêté suite une averse de coups.
23h40, c’est au tour du poids welter français Gabriel Lecrosnier (26 ans, 23-2-1, 5 K.-O.) d’affronter l’ukrainien Viktor Plotnykov (38 ans, 34-3, 16 K.-O.) dans un combat prévu en dix reprises de trois minutes.
Réputé pour sa technique et son élégance, Ahmed El Mousaoui a fait parler ses poings en mettant K.-O. son adversaire par un superbe crochet du gauche à la deuxième reprise. Ce crochet gauche a été son coup fétiche dès le début du combat même si il a atterri de nombreuses fois dans les gants avant de passer définitivement. Face à lui, il a eu un boxeur à la garde hermétique et boxant sur un coup. Ahmed El Mousaoui a su dicter sa loi pour en venir à bout de l’ukrainien qui n’a connu que deux fois la défaite sur trente-sept rencontres disputées. Il a été touché qu’une seule fois véritablement mais il a de suite su réagi en continuant d’envoyer ce crochet gauche qui a fini par casser la garde de Viktor Plotnykov et qui l’a envoyé définitivement au tapis. Il s’est relevé, était prêt à repartir mais son coin lui a fait signe de pas y retourner. Belle victoire d’Ahmed El Mousaoui qui s’offre le premier K.-O. de sa carrière professionnelle, victoire qui lui permet de grimper dans les classements mondiaux et de s’offrir une place de challenge pour le titre EBU détenu par l’italien Leonard Bundu.
23h55, place à l’avant dernier combat de la soirée dans la catégorie des poids mi-lourds entre les Français Hakim Zoulikha (29 ans, 22-8, 10 K.-O.) et Gabriel Lecrosnier (30 ans, 19-37-4, 1 K.-O.) prévu en huit reprises de trois minutes.
Qui aurait pu croire que ce Gabriel Lecrosnier bien enveloppé, pour ne pas dire gras du bide, aurait tenu jusqu’à la limite ? C’est vrai qu’il ne paye pas de mine quand il monte sur le ring sauf qu’un corps sculpté ne suffit pas pour gagner un combat, il faut un bagage technique. Contrairement à ce que pouvait penser ceux qui ne le connaissaient pas, il est un boxeur typique des belles années de la boxe. Il ne refuse aucun combat, boxe les meilleurs en montant et descendant de catégorie si nécessaire. Dans ce combat face à Hakim Zoulikha, il n’a pas fait tâche, bien au contraire. La garde le plus souvent relevée, il a inquiété son adversaire après des séries éclaires de quatre coups à chaque fin de round. Hakim Zoulikha n’est pas parvenu à envoyer une seule fois son adversaire au tapis, chose qui ne l’a pas forcément fait briller aux yeux du public. La boxe d’Hakim Zoulikha prenait à certains moments du combat des allures de bagarre avec des coups derrière la tête notamment en crochet. Dans l’ensemble, Hakim Zoulikha bien géré son combat en ne se reposant pas sur son avance, ça lui aurait été fatal en fin de combat au vu des lourds coups de Gabriel Lecrosnier.
00h40, l’ambiance est électrique et pour cause : le gitan Marvin Petit (25ans, 17-1-1, 8 K.-O) affronte Dame Seck (27ans, 10-12-2, 1 K.-O). Cette opposition nous propose un combat total au vu de leur tête à tête lors de la pesée.
C’est le dernier combat de la soirée dans la catégorie des poids légers prévu en huit reprises de trois minutes. Dame Seck a annoncé la couleur du combat, sûrement le rouge, en débutant avec des séries de crochets. Marvin Petit lui a répondu en lui envoyant un uppercut bras arrière qui l’a ébranlé. Contrairement à de nombreuses soirées ou les gens partent après les combats à titre, l’ambiance est à son comble après une terrible série de crochets de Marvin Petit suivi d’une droite qui a manqué de faire tomber Dame Seck les bras baissés alors qu’il longeait les cordes. Nous avons assisté à une vraie guerre, les deux boxeurs ont tenu leurs promesses. Vers la mi-combat, un cycle a commencé à s’installer avec une nette domination de Marvin Petit soutenu par sa communauté. La sixième reprise a été dure à encaisser pour Dame Seck, on s’est même interrogé sur la passivité de l’arbitre quant à un possible arrêt du combat. Finalement, le coin de Dame Seck a jeté l’éponge à la septième reprise, pensant que le combat était prévu en six reprises.
Un grand merci à Malamine Koné et à son équipe pour cette exceptionnelle soirée boxe, la meilleure en termes d’oppositions et d’intensité malgré les absences de Cédric Vitu et de Franck Petitjean causées par un forfait de leurs adversaires respectifs.
Par Paul Schmitt
Source : Boxemag.com