Le 8 juin, chez lui, à Pont-Audemer, Jonathan Outin (12 v, 1 n, 2 d) a éprouvé beaucoup de difficulté pour conserver son titre national des légers face au solide Aboubeker Bechelaghem (12 v, 1 n, 10 d), vaincu aux points, sur décision partagée (96-94, 98-93 94-96).

Pour sa troisième chance nationale, les deux premières face à Yvan Mendy et Maidin Elgarni s’étant révélées infructueuses, Aboubeker Bechelaghem faisait le choix d’avancer d’entrée et d’exercer un pressing de tous les instants. Très actif, sa débauche de coups payait rapidement car ses crochets gauches transperçaient la fausse garde du Normand. Ce dernier mettait trois rounds pour se libérer… un peu. Le temps de voir, suite à des chocs de tête répétés, un œuf de pigeon se former sous l’œil gauche. Supérieur techniquement, le tenant avait beau l’être, il avait le tort de trop en découdre à mi-distance, de ne pas toujours lever les mains après avoir remisé et de se laisser trop acculer au lieu de tourner et de désaxer plus franchement qu’il ne le faisait.
Son entraîneur, Alain Vastine, le rappelait d’ailleurs à son devoir : « Boxe-le comme tu sais le faire et gère avec ton bras avant. Tu n’as pas à te battre comme ça ! Reviens sur lui après avoir fait des pivots. » Dans le coin du challenger, Mohamed Bennama demandait, quant à lui, à son protégé de ne pas tomber dans son pécher mignon, en l’occurrence, de ne pas confondre vitesse et précipitation et de mieux gérer son effort pour éviter d’avoir trop de déchet : « Ne tape pas dans le vide car ça fatigue. Essaye de dégager après avoir touché. Il panique parce que tu lui fais mal. » De fait, le visiteur avait le mérite de ne pas desserrer l’étau en enchaînant des séries des deux mains.
A la mi-combat, le champion se réveillait enfin. Plus incisif et tranchant, aussi bien lorsqu’il répliquait que quand il passait à l’offensive, c’était lui qui prenait les commandes des débats d’une intensité aussi remarquable que leur issue était incertaine. Conscient que continuer à tourner et à boxer exclusivement sur les jambes l’aurait conduit tout droit vers le précipice et la perte de sa ceinture, l’enfant de Pont-Audemer acceptait d’être plus posé sur ses appuis et de livrer un véritable bras de fer. La stratégie était simple : donner son jab du bras avant pour ensuite lâcher sa gauche en direct et conclure en uppercut. Seulement, l’ancien membre de l’équipe de France amateur pêchait défensivement en sortie d’attaque et s’exposait inutilement comment en attestait son visage très marqué. Et puis il s’entêtait à rester à la distance de frappe de son rival au lieu d’imposer la sienne.
« Je n’ai pas gagné haut la main »
Heureusement pour lui, Aboubeker Bechelaghem, admirable de vaillance et de constance, avait baissé pied physiquement dans le dernier tiers de la confrontation et cherchait un second souffle qui ne venait pas toujours. Cependant, lors de ce qui s’apparentait à une véritable guerre de tranchée dans les ultimes opus, le Haut-Garonnais continuait à toucher de prêt d’autant que Jonathan Outin ne faisait pas des esquives rotatives sa priorité. Dans ces conditions, Mohamed Bennama implorait son élève de ne pas reculer et d’en faire encore plus pour décrocher la timbale en terre étrangère. Pas suffisamment aux yeux des juges qui choisissaient de ne pas déposséder le tenant de son bien.
L’intéressé ne pouvait que s’en féliciter au micro de SFR Sport : « J’étais champion. Il fallait confirmer. J’ai accepté d’affronter le challenger officiel alors que j’aurais pu faire une défense par dérogation. Certes, je n’ai pas gagné haut la main. Pour faire un beau combat il faut être deux et mon adversaire n’a pas démérité. Je tiens à le féliciter. Cela n’a pas été simple. J’ai pris trop de coups car je suis entré dans son jeu. J’ai fait avec mon savoir et mon sérieux. Je suis très satisfait car j’ai confirmé face à bon boxeur, courageux puissant et vaillant ». Le vaincu appréciera l’hommage, lequel n’atténuera en demeurant en rien sa déception fort compréhensible.
Par Alexandre Terrini
Mise en ligne par Olivier Monserrat-Robert