Ouatah dans la douleur

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Le 12 octobre, à Levallois, le Rhône-Alpin (17 v, 3 d) a reconquis la ceinture vacante de champion de France de la catégorie reine en battant par KO à la sixième reprise son copain Cyril Leonet (15 v, 3 n, 11 d). Un combat forcément pas comme les autres.

C’était la quatrième fois que ces deux-là s’affrontaient, Newfel Ouatah l’ayant, jusque-là, toujours emporté, notamment lors de deux championnats de France. Surtout, l’un et l’autre s’apprécient. Newfel Ouatah avait d’ailleurs servi de sparring-partner à Cyrile Leonet lorsque ce dernier préparait son duel face à Tony Yoka. Pendant longtemps, on crut d’ailleurs que le boxeur gitan allait vaincre le signe indien et l’emporter face à son meilleur ennemi. Il avait en effet entamé de la meilleure des manières un match dont la donne n’était un mystère pour personne. Plus petit, le pugiliste de Haute-Vienne n’avait d’autre alternative que d’avancer, de casser la distance et de déclencher de près des crochets les plus puissants possibles. Newfel Ouatah, lui, entendait évidemment tirer tout le parti de son allonge supérieure en s’efforçant de tenir en respect son contradicteur avec son jab ou en uppercut.

Il n’empêche, les débats démarraient sur un faux rythme sans que les protagonistes ne soient véritablement enclins à les emballer. Cyril Leonet, la garde bien haute, continuait toutefois de charger avec conviction et réussissait à toucher de plein fouet. Il faut dire que le natif de Lyon se contentait parfois de gérer les assauts de son rival avec flegme, sans être toujours incisif dans ses remises ni suffisamment mobile pour désaxer dans le temps. Ce qui avait le don d’agacer son entraîneur, Papou Ouajif, qui le sommait, tout à la fois, de se déplacer plus vite, de repartir de plus loin dès lors qu’un accrochage était en vue et enfin, de lever les mains. Son protégé acquiesçait mais, disons-le, donnait quelque peu l’impression d’en découdre avec le poing sur le frein à main comme si l’amitié lui interdisait de se livrer pleinement. Un constat aux allures de spéculation journalistique, certes, mais on a connu Newfel Ouatah nettement plus tranchant.

La dramaturgie s’invita en maîtresse de cérémonie sur le ring

Cyril Leonet, lui, tentait crânement sa chance avec l’abnégation qui est la sienne. D’autant qu’ouvert entre les deux yeux suite à un choc de têtes involontaire dans la troisième reprise, il saignait abondamment. Dès lors, il se mit à accélérer encore plus franchement de peur d’être arrêté par l’arbitre tant la blessure, certes sans gravité, était impressionnante. Cela n’ébranlait pas pour autant le protégé de Papou Ouajif même s’il donnait encore l’impression d’être assez parcimonieux dans ses répliques, ayant, de surcroît, tendance à accepter la bagarre de près, quitte à se laisser engluer. Et ce, au lieu de privilégier les coups longs. Ce qui faisait, comme de bien entendu, le jeu de son opposant. Pourtant, dès qu’il boxait sur les jambes de manière fluide, le Rhône-Alpin faisait parler sa gestuelle léchée et sa vitesse de bras. « Travaille ! Ne le laisse pas venir à toi ! Reste au centre du ring ! Mets bras arrière ! » : les consignes du coin étaient claires et nécessaires tant Cyril Leonet mettait du cœur à l’ouvrage et parvenait à ses fins en se montrant souvent dominateur.

Jusqu’à ce que le scénario maintes fois vécu chez les hommes forts ne décide de l’issue de la confrontation. Alors qu’il était plutôt dominé, Newfel Ouatah, qui est, rappelons-le, un fin technicien tout autant qu’un subtil tacticien, décocha, dans le sixième round, une gauche au menton, mi-crochet, mi-uppercut, et mit KO pour plus que le compte son pote. « Un coup magique », comme il le qualifia, plus tard, au micro de RMC Sport. Reste que la dramaturgie s’invita alors en maîtresse de cérémonie sur le ring. On vit en effet le vainqueur, qui avait eu la décence de ne pas exulter, s’agenouiller au pied du vaillant vaincu, inquiet de ne pas le voir se relever immédiatement. Puis, une fois debout, il le prit dans ses bras, lui adressa des mots de réconfort et l’aida à retourner dans son coin. Ou quand les boxeurs sont de grands hommes.

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