Le 2 mars, à Monaco, le Français (9 v, 1 n, 2 d) n’a pas tremblé pour s’adjuger le titre de l’Union européenne des coqs en battant aux points, à l’unanimité des juges (117-111, 116-113, 117-112), le Belge Razmik Grigoryan (9 v, 2 n, 4 d). De quoi donner un nouvel élan à sa carrière.

Les deux hommes disputaient, en Principauté, leur premier championnat continental et leur première confrontation en douze rounds. Mais c’est le Belge qui semblait surmonter, au départ, le plus aisément l’ampleur du défi en lâchant assez rapidement ses lourdes droites. Le Tricolore, lui, mettait, à l’évidence, davantage de temps pour se libérer et trouver la fluidité gestuelle qui est habituellement sa marque de fabrique. Crispé et donc à la fois prévisible et lent, il venait souvent s’empaler sur le bras arrière de son contradicteur. D’ailleurs, son coin le sermonnait et lui rappelait vertement que ce n’était pas au visiteur de se comporter en patron du carré magique. Conscient que son entame mitigée devait prestement prendre fin, il se décidait à combiner avec davantage de conviction. Néanmoins, l’Angevin était moins virevoltant que lors de son championnat de France face à Jérémy Beccu, en mai dernier, et donnait l’impression d’en garder quelque peu sous le pied. C’est que ses séries avaient un goût d’inachevé car il n’enfonçait pas le clou. Au contraire, il effectuait un pas de retrait après les avoir délivrées, certes souvent dans les règles de l’art, ce qui relançait son contradicteur. Et avait le don d’exaspérer son entraîneur, Patric Bahamed-Athlan, qui lui demandait « d’y aller » et de déclencher le premier. Plus facile à dire qu’à faire pour son élève qui commençait cependant à prendre franchement les devants à compter de la cinquième reprise. Ses puissantes accélérations successives, mêlant savamment crochets et uppercuts, produisaient l’effet escompté : refreiner les ardeurs du pugiliste d’outre-Quiévrain. Une stratégie qui enchantait son mentor dont les directives étaient aussi claires qu’à propos : « Un, deux, trois, j’esquive ! Tu n’as que ça à faire car, en face, il n’y a pas de réaction derrière. Tu ne lâches rien ! »
« Cette victoire est une suite logique »
De fait, le fausse garde tricolore continuait à enclencher la marche avant, parfois de manière un peu monocorde mais sans jamais desserrer l’étau. Si bien que l’ascendant qu’il prenait ne souffrait guère de discussion même s’il ne constituait pas un matelas suffisamment épais pour se reposer sur les lauriers qu’il était au demeurant en passe de conquérir. L’ancien champion de France amateur avait beau être supérieur techniquement, être plus actif que son contradicteur du soir et proposer une boxe ciselée, de près, avec peu de déchet, sa domination était amoindrie par sa propension à continuer d’enclencher la marche arrière en sortie d’échange. Razmik Grigoryan ne se faisait pas prier pour en profiter : il remisait et contre-attaquait en visant le foie. Dans ces conditions, l’issue des débats conservait jusqu’au bout une pointe d’incertitude. Ce qui exaspérait Patric Bahamed-Athlan, lequel demandait à son protégé, à l’entame du dernier opus, de « faire le round de sa vie ». Comment ? « Je veux que tu frappes derrière ses blocages et que tu ne recules plus ! », ordonna le coach. Georges Ory s’y employait et se montrait un peu plus explosif que le Belge, lequel, émoussé tout au long de la deuxième moitié du combat, ne répliquait que sur un ou deux coups qui n'ébranlaient nullement Tino.

L’ex-membre de l’équipe de France pouvait exulter. « Cette victoire est une suite logique. Je suis entré dans le combat en étant un peu tendu puis je me suis relâché, avouait-il au micro de SFR Sport. Sa boxe m’a un peu perturbé au début d’autant que je suis quelqu’un qui analyse beaucoup ses adversaires. » Et si le prochain était Omar Lamiri, à condition que ce dernier s’empare du titre vacant EBU de la catégorie aux dépens du Britannique Lee Haskins ?
Par Alexandre Terrini
Mise en ligne par Olivier Monserrat-Robert
Crédit photos - Patric Bahamed-Athlan