A l’issue d’un duel franco-français comme on aimerait en voir plus souvent, Nadjib Mohammedi (40 v, 5 d) a dominé stratégiquement Hadillah Mohoumadi (23 v, 1 n, 5 d) pour s’imposer à l’unanimité des juges (118-110, 119-109, 119-109), le 30 mars, à Levallois. Plus que la ceinture WBA continentale des super-moyens, c’est une possible opportunité mondiale qui était en jeu.

On crut que le premier opus donnerait le la de la confrontation en en posant les termes. Hadillah Mohoumadi se positionna en effet au centre du ring et se servait de son bras avant pour garder Nadjib Mohammedi à distance. Les premiers échanges étaient emprunts d’une prudence bien compréhensible, chacun ayant conscience qu’il avait la boxe pour gêner l’autre. Bien que très mobile et tournant sans cesse en multipliant les feintes, le Sudiste ne parvenait pas - encore - à tromper la vigilance de l’ancien champion d’Europe. Cependant, ce dernier éprouvait déjà des difficultés à le cadrer avec sa droite. Sentant le danger poindre à l’horizon des seize cordes, son coin le sommait de garder ses distances au lieu de s’enferrer de près et d’être brouillon, ce qui n’est habituellement pas le genre de la maison.

A la longue, Irondjib parvenait à enrayer la mécanique bien huilée du Francilien. Une profusion de jabs du bras avant, des crochets savamment distillés et une bonne dose de pas de côté : le cocktail était gagnant. A la fin de la quatrième reprise, l’Élancourtois exprimait d’ailleurs toute sa frustration dans un cri rageur. Dans la cinquième, le Marseillais s’offrait, pour la première fois, le luxe de véritablement enchaîner. Il avait le don de débiter des droites qui, l’air de rien, se révélaient terriblement usantes par leur accumulation.
Cible mouvante contre droite qui ne passe pas
Le sixième round tournait à la démonstration, l’enfant de Gardanne boxant sur un coup, crochet ou uppercut, qui faisait mouche avant de prendre la poudre d’escampette pour annihiler toute velléité de remise de son contradicteur. Tactiquement, la chose était bien pensée. D’ailleurs, le Francilien ne trouvait à l’évidence pas la solution. Parfois, il parvenait à allonger sa droite à mi-distance et se facilitait alors grandement la tâche. Mais, inexplicablement, il rééditait ce genre d’initiative de manière bien trop sporadique pour espérer inverser la vapeur. C’était bel et bien lui qui était le plus souvent sur le reculoir, complètement anesthésié par la boxe précise et tout en décalages de l’Azuréen, lequel déclenchait sous tous les angles ou presque. Son coup d’œil lui permettait de faire tout ce qu’il voulait, même de transpercer la garde de l’Yvelinois. Ce dernier, n’ayant plus la lucidité ni l’énergie de faire les pas de côté ou de retrait qui s’imposaient, encaissait de plein fouet des séries des deux mains.

Veillant à être toujours une cible mouvante, Irondjib non seulement ne faiblissait pas ni ne levait le pied mais conservait une remarquable précision. Ces touches incessantes le préservaient d’une déconvenue dans les derniers rounds, Hadillah Mohoumadi n’ayant plus suffisamment d’essence dans le moteur pour espérer l’emporter avant la limite avec son bras arrière qui n’était que bien trop rarement arrivé à destination.

A l’issue de l’ultime coup de gong, chacun était dans son rôle. Le vaincu réclamait une revanche « tout de suite, demain, au prochain tour » et assurait que « la ceinture », il la « récupèrerait ». Le vainqueur, lui, ne se privait pas du doux plaisir de saluer un public qui l’avait copieusement conspué et expliquait, au micro de Canal+, avoir bien étudié son rival et s’être préparé comme il le fallait pour s’emparer de la dix-septième ceinture de sa carrière, laquelle « n’est qu’un début ».
Par Alexandre Terrini
Mise en ligne par Olivier Monserrat-Robert
Crédit photos : Denis Boulanger - Presse Sports