Mimoune s'est fait peur

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Le Français (20 v, 2 d) est allé au bout de lui-même pour conquérir, le 20 janvier, à Levallois, le titre IBO des super-légers aux dépens du valeureux et jusque-là invaincu Argentin Emiliano Dominguez Rodriguez (21 v, 1 d), battu aux points, à l’unanimité des juges (116-109, 117-108, 113-112). Mais ce ne fut vraiment pas simple.
 
 
Dix secondes que les hostilités avaient débuté et le Toulousain se retrouvait sur son céans, cueilli par une droite en sortie d’attaque. Heureusement, l’avertissement était sans frais ni conséquence puisqu’il récupérait aisément. Il n’empêche, l’incident était révélateur : le Français avait le tort de tourner en baissant à l’excès sa main gauche. Son coin le rappelait d’ailleurs prestement à l’ordre : « Ne sors pas ta tête ! Reste groupé ! Concentre-toi ! » De fait, dans les minutes suivantes, l’ancien champion d’Europe des welters donnait l’impression de retrouver sa vista et son aisance dans ses déplacements. Ses attaques dans des angles improbables, tantôt à distance, tantôt mi-distance, voire de prêt déboussolaient le Latino, lequel confondait de surcroît vitesse, précipitation et fougue. Au point de se faire remonter les bretelles par l’arbitre qui lui reprochait, pêle-mêle, de boxer tête en avant, de ceinturer à l’excès le Haut-Garonnais et de le frapper derrière la tête.
 
Nullement décontenancé par ces mises en garde, l’Argentin s’évertuait à durcir autant que possible les débats en travaillant systématiquement en puissance, d’abord aux flancs pour ensuite fort logiquement remonter au visage. Mohamed Mimoune, lui, avait, par intermittence, le tort de trop accepter le défi physique voulu par le visiteur, quitte à se laisser inutilement acculer dans les cordes. A ce jeu périlleux, il se montrait vulnérable et se faisait toucher. C’est pourquoi ses entraîneurs l’imploraient de boxer davantage, de ne pas rester statique à bloquer, bref, d’être plus constamment entreprenant, en particulier à l’intérieur avec des uppercuts. Quant au Latino, il était compté dans le quatrième round alors qu’il semblait n’avoir que trébuché. Puis, dans l’opus suivant, il écopait d’un avertissement pour coups de tête répétés. Toujours est-il que le Français avait tendance à subir un peu trop et à insuffisamment remiser pour donner l’impression de véritablement inverser la vapeur. On ne comprenait pas pourquoi il n’était pas aussi virevoltant et à son aise qu’à son habitude, lui qui sait si bien déjouer les assauts des battants dits organisés. On apprendra plus tard, dans l’intimité du vestiaire, qu’il s’était cassé la main gauche dès le deuxième round. Un handicap pour le moins gênant pour un fausse garde…
 
L’homme à la main d’argile
 
Sa prestation amoindrie malgré lui ne l’empêchait pas, en allant au bout de la souffrance, d’assurer l’essentiel et de marquer les touches qu’il lui fallait. Certes, dans ces conditions, la partition n’était pas dépourvue de fausses notes mais à un moment donné, peu importe le flacon pourvu que l’on ait l’ivresse. D’autant que lorsque Mohamed Mimoune, surmontant sa douleur, se lâchait véritablement, en clair, quand il accélérait durablement en délivrant des séries longues et en effectuant des pas de retrait au moment opportun tout en désaxant, il surclassait le natif de Santa Fe et l’empêchait évidemment de sévir. Si de telles fulgurances étaient trop rares pour asseoir sa domination dans les grandes largeurs, elles le maintenaient à flot et… en tête sur les bulletins des juges. Mais rien n’était joué, quand bien même le visiteur, forcément un peu émoussé physiquement, devenait plus stéréotypé et donc prévisible dans ses attaques. Conscient que l’affaire était loin d’être pliée, le clan tricolore exhortait le héros de la soirée à être plus actif et, surtout, à se montrer plus constant dans ses initiatives. « Fais du Mimoun et mets du rythme ! », lui hurlait-on en désespoir de cause. Plus facile à dire qu’à faire avec… un seul bras. En effet, l’intéressé peinait à être pleinement lui-même et à faire montre de la maestria qui l’avait jusque-là porté vers les sommets. Néanmoins, même ainsi amoindri, il avait suffisamment de beaux restes pour décrocher la timbale aux dépens d’un adversaire trop monolithique pour donner l’impression qu’il était au-dessus.
 
 
La joie emprunte d’une légitime fierté qui animait le nouveau champion du monde, qui s’est senti plutôt à son aise dans sa nouvelle catégorie, était cependant ternie par le mal qui le tenaillait et surtout, par ses inquiétudes quant à la nature et à la gravité de sa blessure. Une chose est sûre, sa convalescence s’annonce longue pour retrouver l’intégralité de ses moyens et ne pas hypothéquer la suite de sa brillante carrière.
 
Par Alexandre Terrini
 
Mise en ligne par Olivier Monserrat-Robert
 
Crédits photos : Presse Sports et Facebook Mohamed Mimoune

 

 

 

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