Jose Chacon, au grand Homme le noble art reconnaissant

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Le fondateur du BAC 9, l’un des plus célèbres club de boxe de la Capitale est décédé le 25 février, à 73 ans, des suites d’une longue maladie. Plus qu’un coach l’âme chevillée au corps, l’homme était un passeur de savoir, d’humanité et de valeurs.

Tout a commencé sur les rives de l’Atlantique, dans cette lointaine Andalousie qui l’avait forgé autant que la dictature franquiste qui avait baigné sa prime enfance. C’est donc à Cadix que Jose Chacon s’enamoura de la boxe. Il lui était, depuis, demeuré d’une fidélité monacale. Pourtant, dans la Péninsule, rien ne fut simple pour vivre sa passion. Non seulement, sa grand-mère, qui l’élevait, était opposée à l’idée de voir son petit-fils mettre les gants mais les clubs ibériques n’ouvraient alors leurs portes qu’aux partisans du Caudillo.

Dans la fleur de l’adolescence, le gamin franchit les Pyrénées pour rejoindre sa mère qui avait refait sa vie, à Paname, avec un Français. Ce fut la libération dans toute la polysémie du terme. Le jeune homme convola définitivement avec le noble art, d’abord à Saint-Ouen, sous l’auguste parrainage de la famille Rodriguez dont les trois fils, Richard, Jo et, bien sûr, Lucien brillèrent dans le carré magique. Il n’était encore qu’un honorable amateur quand le souci du lendemain qui ne déchante pas le rattrapa. A vingt-cinq ans, il renonça au professionnalisme pour s’établir comme plombier à son compte, rue Henri Monier, dans le IXe arrondissement.

Les actes pour donner corps aux paroles, encore et toujours

Rapidement, il passa de l’autre côté des cordes et devint l’entraîneur et le mentor d’une poignée de gamins qu’il façonna, dans un premier temps, du côté de Clignancourt. Puis, las de cette transhumance dans le nord de la Capitale, il usa de toute sa force de persuasion - pas la moindre de ses qualités - auprès des édiles locaux pour se voir octroyer une salle digne de ce nom, sise rue Buffault. La Mairie finit par céder, en 1985, convaincue par cet éducateur droit et foncièrement altruiste, désireux d’implanter le noble art dans un quartier qui était, jusque-là, dépourvu de toute infrastructure dédiée. Pour cela, il lui avait fallu convaincre les élus des vertus pédagogiques de la chose. Le Boxing Athletic Club du IXe, le BAC 9 pour les intimes, était né et bien né.

Le Maître des lieux modela d’emblée la maison à sa manière, toute à la fois accueillante, joviale, stricte familiale, exigeante. Bref, en un mot humaine. Pas besoin d’être devin pour entrevoir que son histoire personnelle lui avait fait épouser le progressisme et tourner casaque dès que pointait l’esprit réac et conservateur. On parle souvent de melting-pot en se gargarisant. Chez lui, c’était une réalité et pas pour faire bien. Tout le monde côtoyait tout le monde, anonymes et célébrités, doués et laborieux, cadres sup le vent en poupe et prolétaires qui rament. Jose Chacon avait aussi mis grassement la main à sa poche pour financer l’achat de matériel. Les actes pour donner corps aux paroles, encore et toujours.

Il n’eut de cesse d’enseigner la boxe telle qu’il la voulait, telle qu’il ne l’a voulait pas aussi. En prônant la technique des deux poings et la gestuelle au service de la fameuse loi d’airain de l’apprenti pugiliste : toucher sans se faire toucher. Le professionnalisme, ses connivences et ses compromissions ? Très peu pour lui. L’homme était un pur qui ciselait avant tout des amateurs. Parmi eux, Luigi Mancini, Mohamed Boulakhras et Souleymane Cissokho qui délivra ses premiers directs sous ses ordres à quatorze ans. Le médaillé de bronze aux JO de Rio se souvient d’un « être exceptionnel et profondément humain, doublé d’un bon vivant. C’était un grand homme pour lequel j’ai beaucoup d’estime. Il m’a beaucoup appris et fait évoluer en tant que boxeur mais également en dehors de la boxe. Cela lui tenait à cœur de prendre soin de ses boxeurs. Il voulait que nous soyons des champions sur le ring mais aussi en dehors. Cette faculté à prendre du recul sur les choses vous aide dans la vie de tous les jours. Il était très généreux et aimait aider son prochain. »

« Il nous donnait tellement d’amour »

Mohamed Boulakhras, double champion de France amateur et ancien entraîneur national, ne dit pas autre chose : « Jose était quelqu’un d’important pour moi. J’ai débuté avec lui. Je l’ai toujours porté dans mon cœur et je ne l’ai jamais oublié. Il a ouvert sa porte à tout le monde, dont à moi, et, surtout, il ne l’a pas refermée. C’est pour cela que l’on s’attachait très vite à lui. Il nous a accompagnés à tous les niveaux, notamment dans nos réflexions. Il nous a apporté beaucoup de choses, en particulier une éducation et des valeurs qui, aujourd’hui, ont tendance à se perdre. C’était un père pour nous. Il vous recevait comme si vous étiez son enfant. Il nous donnait tellement d’amour qu’on ne pouvait que le lui rendre. »

Aujourd’hui, Laurent Chacon, fils de Jose, a pris le relais au sein du BAC 9. On pense alors invariablement à l’adage qui trône au-dessus du bureau de son père. Il est signé de Nelson Mandela : « La plus belle victoire de l’homme n’est pas de ne jamais tomber mais de se relever une fois tombé. »

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