Le Français a su éviter les écueils pour conserver sa ceinture WBC Francophone des lourds-légers en dominant, aux points, à l’unanimité des juges (116-112, 117-111, 115-113), le dangereux Tchèque Vasil Ducar (8 v, 1 n, 2 d), le 16 novembre, à Levallois.
Le premier round confirma ce que l’on pensait : le sieur Ducar n’était pas du genre à se laisser submergé par une ambiance hostile en terre étrangère. Plutôt sûr de lui, mobile quand il le fallait, tournant sans fuir, remisant dès qu’il le pouvait, il se montrait, dans l’ensemble, à son aise. En face, le Normand avançait en veillant à ne pas se découvrir. Car, avec lui, il y a toujours cette épée de Damoclès qui fait redouter de le voir encaisser un contre de plein fouet susceptible d’annihiler ses rêves de grandeur. Cela s’était déjà produit, rappelons-le, devant Siril Makiadi et Olivier Vautrain.
Mais, avouons-le, à force de délivrer des crochets au flanc et surtout des uppercuts à foison, il livrait, là, une prestation bien pensée qui lui permettait de tisser sa toile. Le tout sans prendre de risques inconsidérés. En somme, en alliant subtilement une initiative constante et une vigilance plus que jamais de mise. Le Rouennais s’efforçait de donner son direct du gauche, histoire de réfréner les velléités du visiteur et, mieux, d’enchaîner. Surtout, il levait bien les mains en sortie d’échange et entre chaque attaque afin de s’épargner le pire. En confiance, il haranguait même, par quelques pas de danse, ses supporters lors de la minute de repos à la fin du troisième round. Cependant, si l’affaire était bien engagée, elle n’était pas gagnée d’avance. Plus râblé, peut-être aussi un peu plus puissant, le challenger avait le bon goût de boxer sur les jambes et de fréquemment esquiver en effectuant les pas de côté qui s’imposaient. Ce qui le mettait en position d’asséner sa droite lourde.
Des sueurs froides dans le coin
Dans la cinquième reprise, on craignit le pire lorsque l’une d’elles cueillit le champion, lequel vacilla et vécut un mauvais moment, son rival tentant, comme de bien entendu, d’en finir mais sans y parvenir. A l’évidence parfaitement préparé, le Français parvint à récupérer et à reprendre les commandes des opérations. Des sueurs froides qui incitèrent toutefois son coin à l’enjoindre de rester concentré et de soigner sa garde. Ce à quoi s’employa le Tricolore.
Heureusement, Vasil Ducar avait une boxe de l’Est, certes en ligne mais parfois trop stéréotypée et lisible. D’ailleurs, des deux côtés, beaucoup de coups étaient bloqués dans les gants. Néanmoins, c’était bel et bien Hervé Lofidi qui imprimait les changements de rythme les plus probants et les plus inspirés. Grâce à des séries à mi-distance mais également à son jab, il marquait de précieux points. En outre, il confortait son ascendant grâce à un cardio supérieur. Bref, le succès était à portée de poing. Il n’était conditionné que par un impératif : ne pas laisser d’espace et de liberté à son adversaire, le contenir en travaillant sans cesse, en restant le moins possible en face et en n’allant point à la guerre. Ce qui ne l’empêchait pas de varier les plaisirs, parfois en touchant de près, parfois en se muant en Artiste pour mieux exploiter, avec une belle fluidité gestuelle, son allonge supérieure. Son contradicteur, lui, n’avait qu’un objectif en tête, clair comme de l’eau de roche : passer son bras arrière coûte que coûte et ainsi abréger les débats.
« Hervé, c’est un chaud bouillant »
Toutefois, se sachant en avance au pointage, le Normand gérait les affaires courantes les mains bien hautes, en se déplaçant mais sans subir, pas même lors du dernier opus au cours duquel, par orgueil, les deux duellistes jouèrent leur va-tout sans beaucoup d’académisme mais avec suffisamment de cœur à l’ouvrage pour faire lever le public.
Logiquement déclaré vainqueur, Hervé Lofidi savourait sa performance au micro de Canal+ : « C’est vrai que c’était un combat difficile. Je m’y attendais. Avant ce match, j’étais classé soixante-et-unième mondial tandis que Vasil était dans les vingt premiers. En face, ça frappe. On a fait le boulot. On s’est entraîné dur pendant deux mois et cela a porté ses fruits. Dans le coin, mon coach, Michel Mokoury, me demandait de combattre tantôt à distance, tantôt en corps à corps. J’ai appliqué les consignes avec merveille. » Ce qui a ravi son entraîneur : « Je suis satisfait car dans un match, on ne fait pas toujours ce que l’on veut. Le principal reste la victoire. Hervé a évolué techniquement même s’il était déjà très bon. Il doit apprendre à ne pas trop aller à la bagarre et à être davantage tactique. C’est un chaud bouillant. Il faut le canaliser et le tenir sur le ring. » Mission accomplie.