En venant à bout, en une vingtaine de secondes, le 17 décembre, à Saint-Denis de La Réunion, du jusque-là invaincu Vénézuélien Alfonso Blanco (12 v, 1 d), pour le titre WBA par intérim des moyens, le Franco-camerounais (35 v, 2 d) a indéniablement redonné un nouvel élan à sa carrière.

De l’art de gagner un combat en deux coups, en l’occurrence, un direct du gauche suivi d’un crochet droit à la pointe du menton. Une combinaison qui ne doit rien au hasard car le coin du challenger avait remarqué que le Sud-Américain, sorti il y a encore peu fraîchement émoulu des rangs amateurs, a tendance à avoir la main gauche pas assez haute. Toujours est-il que pareil enchaînement d’école propulse de nouveau Hassan N’Dam N’Jikam sur le devant de la scène planétaire. Il était temps, oserait-on écrire. Une manière de dire qu’il n’avait plus droit à l’erreur après, faut-il le rappeler, deux cruelles défaites aux points en championnat du monde face Peter Quillin, à New-York, en novembre 2010, puis devant David Lemieux, à Montréal, en juin 2015. Sans compter une élimination au premier tour des Jeux olympiques de Rio en… mi-lourds.
« Prouver que c’est là ma place »
Si bien qu’à trente-deux printemps, n’étaient pas rares ceux qui le voyaient sur le crépuscule et lui prédisaient un irrémédiable déclin annoncé. L’intéressé n’a rien oublié de ces bruits de vestiaire et leur dédie avec concupiscence sa victoire expéditive : « C’est une vengeance sur la vie ou, à tout le moins, une revanche à l’égard de tous les gens qui m’envoyaient à la retraite. Je suis un être humain et cela a touché mon orgueil et ma personne. Or, trente-deux ans, c’est l’âge de la maturité. C’est une immense de fierté d’être redevenu champion du monde, de prouver que c’est là ma place et que je la mérite ». Deux mois à Miami, sous la houlette de Pedro Diaz, longtemps entraîneur de l’équipe nationale cubaine amateur, se sont visiblement avérés bénéfiques pour redonner du poil de la bête au Francilien qui, conscient de l’enjeu et de l’importance de son succès, de surcroît acquis de telle sorte, n’a pu retenir ses larmes au moment du verdict. Le technicien latino a commencé à façonner à sa manière l’enfant de Douala en corrigeant par petites touches des défauts qui faisaient obstinément de la résistance : un bras avant un peu trop bas, une faible propension à travailler en corps-à-corps, la défense etc. Et voilà El Fenomeno conquis par la méthode, lui qui n’avait pas vraiment trouvé son compte lors de sa précédente expérience américaine avec un autre au coach de renom, Virgil Hunter. Il regrette que ce dernier ait voulu bouleverser de fond en comble son style, par exemple en le faisant boxer pieds à plat. Une façon de faire qui, de son propre aveu, a eu pour effet dévastateur de le désorganiser et de lui faire perdre ses repères entre douze cordes. C’est pourquoi Hassan N’Dam N’Jikam envisage désormais de conserver cette configuration qui lui correspond : il continuera de s’entraîner au Levallois Sporting Club, en particulier avec Youssef Barit, mais partira en Floride effectuer des préparations de plusieurs mois avant chaque échéance.
Défier le meilleur des meilleurs, Gennady Golovkin
Un plan de bataille gage de sérénité, lui qui a connu une longue période d’errance après sa déconvenue canadienne : « J’ai eu une phase au cours de laquelle j’étais perdu. J’étais dans un tourbillon et je cherchais la sortie. Je me sentais plus bas que terre. Je ne souhaite ça à aucun boxeur. Mais j’ai toujours eu un mental et foi en moi, ce qui m’a permis de me relever comme sur le ring ». Suffisant pour ambitionner d’abord de défendre ce sceptre si brillamment conquis puis, à terme, de défier le meilleur des meilleurs, le Russe Gennady Golovkin, superchampion WBA de la catégorie mais aussi détenteur des couronnes WBC et IBF. Sachant que le Francilien est en réalité non plus champion WBA par intérim mais régulier dans la mesure où le tenant, l’Américain Daniel Jacobs, a abandonné sa ceinture puisqu’il doit en découdre avec Gennady Golovkin, le 18 mars prochain. Un plan de carrière confié au promoteur Sébastien Acariès avec lequel la hache de guerre a été enterrée. Au point que les différends ont été aplanis et les actions judiciaires levées, le Franco-Camerounais étant convaincu qu’un bon compromis vaut mieux qu’une guerre larvée sans fin. A fortiori quand on a le monde comme unique horizon.
Par Alexandre Terrini
Source : FFB