Après sa précédente sortie quelque peu laborieuse, en novembre, devant la Marseillaise Emma Gongora, la championne olympique (9 v) a remis les pendules à l’heure en triomphant avec la manière de l’Allemande Verena Kaiser (14 v, 2 d), battue aux points, à l’unanimité des juges (98-92, 97-93, 98-92), le 5 mars, à l’H Arena de Nantes. Une victoire qui lui a permis de conserver sa ceinture IBO des légères.
Dans les colonnes de L’Équipe, Estelle Mossely expliquait récemment qu’en « boxant, je gagne ma liberté. Un sentiment, précieux, de pouvoir faire ce que je veux, d'être libre de mes choix de vie. » Gageons que sa performance toute en maîtrise devant la vaillante et déterminée Verena Kaiser la confortera dans cette légitime ambition d’être elle-même, à la solde de ses aspirations plurielles de sportive de haut niveau, de mère, d’épouse et d’ingénieur.
Une copie mûrement réfléchie
Sur le ring de l’H Arena, elle a mobilisé autant son esprit que son corps pour rendre une copie mûrement réfléchie dont l’intitulé n’avait rien de sorcier dans sa formulation mais rien non plus d’évident dans sa réalisation : endiguer les courageux assauts de sa challenger pour l’emporter dans les grandes largeurs, c’est-à-dire en justifiant un statut de favorite sur le papier. A cette louable fin, la Francilienne a fait ce qu’il fallait : alterner contres opportuns pour s’engouffrer dans les failles défensives germaniques et ajouter à cela un zest de panache en prenant également à son tour l’initiative et en lâchant sa droite.
Supériorité ne signifiant pas pécher d’orgueil ni propension à tomber dans la facilité, elle s’en est sagement tenue à cette ligne de conduite pour s’offrir à un succès net et sans bavure. Bien plus richement pourvue techniquement, la Tricolore a utilisé à satiété son bras avant et tourné quand il le fallait histoire de se mettre hors de portée de sa rivale. En revanche, elle n’a pas toujours su en découdre à la bonne distance, ses coups arrivant parfois en bout de course ou n’atteignant pas leur cible. Cependant, les combinaisons les plus incisives ont été à mettre à l’actif de la tenante, à la fois plus précise, plus variée et plus rapide sur le plan gestuel. De quoi lui donner le sourire au moment du verdict.

Réunification des ceintures et Paris 2024 dans le viseur
« Je suis contente de ce résultat, avouait-elle d’ailleurs à sa descente du ring, au micro de Canal+. Je n'ai voulu prendre absolument aucun risque. Je voulais voir si j'étais capable d'appliquer les consignes du début à la fin. Mes coaches sont contents, c’est le plus important. J'étais bien. J’ai mis à profit mes six semaines d’isolement aux États-Unis. Cela m’a fait du bien mentalement. Physiquement, je suis très bien. Je ne suis pas fatiguée à la fin du combat. C’est vraiment important pour moi. Il y a parfois des concessions à faire. M'isoler loin de mes enfants et s’entraîner loin de tout, c'est essentiel pour progresser. » A fortiori quand on vise le firmament car la Val-de-Marnaise, pas du genre à verser dans la demi-mesure, voit très grand : « Cette ceinture marque mon retour mais ce n’est que mon retour. Maintenant, il faut progresser car il y a beaucoup d’autres ceintures à aller chercher. Ce soir, j’ai pu mettre à profit tout ce que j’ai travaillé mais il y a encore beaucoup de progression à effectuer. Ce sont des combats difficiles qui m’attendent. Aujourd’hui, l’objectif est clair : unifier les ceintures. Et puis il y a les Jeux de Paris 2024 qui vont très vite arriver derrière. C'est un double objectif mais je veux vraiment prendre le temps de bien faire les choses, sans précipitation. » Un doublé olympique et un statut de championne du monde unifiée dans une catégorie marquée par le règne omnipotent de cette vielle connaissance de Katie Taylor : l’Histoire, la grande, est en marche.