Cédric Vitu, le non-match

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Arrêté bien tardivement par l’arbitre à trente secondes du terme du combat, le Français (46 v, 3 d) n’a jamais réussi à mettre en danger l’invaincu champion du monde WBA des super-welters, l’Argentin Brian Carlos Castano (15 v), samedi 10 mars, à La Seine Musicale de Boulogne-Billancourt. Une défaite qui laissera des traces.
 
 
Pourtant, Cédric Vitu avait rompu avec une fâcheuse tendance : celle de débuter les hostilités piano, piano et de se faire piquer avant de déclencher les hostilités. Là, dès le coup de gong initial, le fauve avait été lâché et n’hésitait pas à aller agresser le tenant sur son terrain. C’est lui qui plantait les premières banderilles en avançant dans sa posture si caractéristique, mains basses, le bras avant parfois en bouclier. Très affuté, il entrait donc directement dans le vif du sujet en produisant des accélérations au corps, d’abord, pour ensuite remonter à la face.
 
 
 
 
 
 
 
Placide, l’Argentin tournait, histoire de prendre la mesure de la chose. Mais prestement, sans même attendre la fin d’un premier opus qui ne fut nullement d’observation, il répliqua en latino sans peur et sans reproche qu’il est. La façon de procéder était simple : avancer, exercer un pressing à l’étouffée et délivrer d’impressionnantes séries de crochets des deux mains essentiellement au visage. Le tout sans confondre vitesse et précipitation mais avec suffisamment de rigueur gestuelle et de précision pour faire mouche. Il y parvenait d’autant plus aisément que la garde du Picard était un peu lâche et que celui-ci restait trop longtemps dans la zone de frappe de son rival au lieu de désaxer, voire de reculer plus franchement.
 
Les armes pour inverser la vapeur
 
On se plut alors à croire qu’au bout de ces trois minutes d’entame, l’Isarien avait tiré les leçons qui s’imposaient : ne laisser en aucun cas son contradicteur parvenir à ses fins. Autrement dit, l’empêcher d’imposer un bras de fer de près et à mi-distance qui lui permettait de faire parler sa puissance supérieure et sa rapidité gestuelle. Malheureusement, le Creillois eut le tort de trop accepter la bagarre au lieu de faire ce qu’il sait si bien faire et ce qu’il avait maintes fois répété à l’entraînement avec brio : toucher et partir, enchaîner tout en étant sans cesse sur les jambes, bref, faire parler sa vista.
 
 
 
 
 
 
 
 
Dans le troisième round, on comprit que la soirée serait dure et qu’elle avait de fortes chances de virer au chemin de croix. Il se laissa en effet inexplicablement acculer dans les cordes et s’offrit en cible quasi-statique au Sud-Américain qui le pilonna alors sous tous les angles sans jamais être contrecarré dans son entreprise de démolition. Le Creillois encaissait de plein fouet sans broncher, autant par vaillance que par orgueil. Des qualités certes louables, voire inestimables entre seize cordes mais hors de propos pour endiguer une telle tornade.
 
 
 
 
 
 
 
Le pire est que l’on avait le sentiment frustrant que Cédric Vitu avait les armes pour inverser la vapeur, pour être le maître du carré magique. Pour cela, il lui eut fallu être lui-même, ce pugiliste intelligent et malin qu’il est, assurément, capable d’être. Hélas, l’enjeu, la volonté de (trop) bien faire et le poids d’une vie passée le poussaient à se transcender en empruntant des chemins de traverse qui le rapprochaient toujours plus d’un inexorable précipice. Le natif de Buenos-Aires, lui, n’en demandait pas tant et se montrait tout à son aise dans un tel scénario. Lucide, il ne se précipitait pas et passait à l’action avec la froide préméditation du prédateur sûr de lui.
 
Les tréfonds du courage et de l’abnégation
 
Le temps passait et le Tricolore ne changeait toujours pas de stratégie sans que l’on ne comprenne pourquoi. Il s’obstinait à rester en face, quitte à ne remiser que de manière sporadique, en particulier avec son bras arrière. Lui qui, habituellement, est si talentueux lorsqu’il s’agit de débiter en mouvement et de trouver l’ouverture avec son formidable coup d’œil, était pris à son propre piège. Or, sans minimiser la remarquable prestation de Brian Carlos Castano, qui avait le mérite de rester fidèle à son plan de bataille, les solutions existaient pour le contrecarrer. D’abord, parce que quoi que l’on en dise, le Sud-Américain était très prévisible et faisait systématiquement la même chose. Ensuite, parce que les très rares fois où Cédric Vitu répliquait et imposait des changements de rythme, il parvenait à déborder et à contrer son opposant du soir.
 
 
 
 
 
 
 
 
Mais ce fut là le chant du cygne de l’ancien champion de France et d’Europe car quand bien même s’évertuait-il à se montrer entreprenant en début de round, ses offensives étaient, pour l’essentiel, bloquées par l’Argentin qui avait le bon goût de monter les mains. Les contre-attaques du champion étaient peut-être encore plus dévastatrices que ses attaques car elles intervenaient après une débauche d’énergie du Français.
 
 
 
 
 
 
 
 
Quand bien même, à la mi-combat, le Sud-Américain, quelque peu émoussé physiquement, desserrait un tantinet l’étau, c’est lui qui demeurait le plus actif et le plus efficace, soit en donnant son jab du bras avant pour passer sa droite dans la foulée, soit en combinant toujours des deux mains au visage. Des poings qui se transformaient en enclumes. Surgissant du bois quand bon lui semblait, il faisait subir l’enfer au Picard, martelé de toutes parts, parfois même sans plus chercher à parer, quitte à en réclamer encore….
 
 
 
 
 
 
 
 
Certes, les tréfonds de courage et de son abnégation, admirables et respectables, faisaient se lever la foule. Mais, en championnat du monde, cela ne peut suffire. La crucifixion vint dans l’ultime reprise quand, sur une énième droite, l’enfant de Creil, qui était allé plus loin que le bout de lui-même, s’affaissa sur le tapis. Il se releva. L’Argentin n’eut aucune pitié alors même la cloche s’apprêtait à retentir.
 
 
 
 
 
 
 
On enfonce une porte grande ouverte en écrivant que Titi le magnifique devra prendre le temps de bien réfléchir à la suite qu’il entend donner à sa carrière et, surtout, à sa vie…
 
Par Alexandre Terrini
 
Mise en ligne par Olivier Monserrat-Robert
 
Crédit images - KDLP/Ringstar

 

 

 

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