Buval au paradis

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Le Parisien (10 v, 1 n, 12 d) a créé la surprise en détrônant aux points, à l’unanimité des juges (96-94, 98-92, 98-92), le champion de France des mi-lourds, Eddy Lacrosse (11 v, 2 n, 6 d), le 28 juin, à Puiseux-Pontoise. Un avènement inespéré à trente-et-un ans.
 
Eddy Lacrosse entamait les hostilités quelque peu un ton en dessous de ce que l’on attendait de lui. Plus petit mais beaucoup plus râblé que le challenger, il peinait à s’approcher et à travailler de près comme il l’aurait souhaité. Certes, il faisait le pressing mais parfois par intermittence, en prenant inutilement le temps de changer de garde. Ce qui offrait à Kévin Buval la possibilité de s’organiser en donnant son direct du bras avant et en tournant pour ne pas se laisser empêtrer dans un mano a mano nez à nez. Mieux, ce dernier, qui n’avait pourtant pas les faveurs des bookmakers, se montrait d’une remarquable lucidité technico-tactique. Vigilant défensivement, gardant les mains bien hautes, il s’offrait le luxe de contrer durement le tenant, lequel allait sur les talons dans la deuxième reprise. Exploitant son allonge supérieure, le Parisien donnait sa droite à satiété, sans négliger de somptueux uppercuts quand son adversaire adoptait, lui, un plan de bataille trop stéréotypé et donc lisible. Il consistait à enclencher la marche avant et à asséner des crochets larges surpuissants tout en multipliant les esquives rotatives.
 
 
Eddy Lacrosse pas aussi incisif qu’il sait l’être
 
A ce jeu, Kévin Buval déjouait les pronostics et était, un peu à la surprise générale, le maître du ring. Une prestation qui lui valait les louanges de son coin : « C’est très bien ! Reste vigilant ! Une fois que tu as travaillé sur deux coups, décale ! Tu vas plus vite que lui, ne prends pas de risque. La variation des zones de frappe, c’est très bien. Insiste avec le cross du bras arrière. Ne t’épuise pas, il y a des rounds à faire. » Des conseils avisés.
Conscient que sa ceinture était en train de le quitter pour un autre, Eddy Lacrosse allait davantage au charbon dans la deuxième partie de la confrontation avec la louable intention de forcer son destin et de passer en force. Cependant, il avait trop tendance à suivre son contradicteur au lieu de lui couper franchement la route. De surcroît, son punch était endigué pour ne pas dire annihilé par son opposant plus fin stratégiquement, plus précis et qui remisait avec efficacité après avoir effectué le pas de côté qui s’imposait. Si bien que l’Aquitain, trop monolithique et pas aussi incisif qu’il sait l’être, donnait souvent l’impression d’être renvoyé dans ses foyers et mis dans le vent à force de s’obstiner à ne travailler que sur un seul coup et à s’exposer à cause d’une satanée main gauche trop basse. En attestait sa pommette sérieusement endolorie. Néanmoins, ses qualités d’encaisseur qui ne l’incitaient pas à changer son fusil d’épaule, ce qui faisait les affaires de son valeureux rival, lequel, fort intelligemment, demeurait vigilant. Sa capacité à ne pas tomber dans le péché d’orgueil le rapprochait imperturbablement du Graal. Les juges le lui offraient sur leurs bulletins sans qu’il n’y ait rien à redire.
 
 
« Il doit me manquer un peu de hargne »
 
L’hymne à la joie pouvait retentir pour Kévin Buval, qui savourait cette consécration au micro de la chaîne Sport en France : « Je sentais que j’étais plutôt en fin de carrière et depuis des années, je m’étais fixé comme objectif d’avoir la ceinture autour de ma taille. Aujourd’hui, on y est et je pourrai arrêter en toute sérénité. Je n’ai pas souvent boxé à domicile. Il doit me manquer un peu de hargne pour faire quelque chose dans la boxe. C’est ce que reflète mon palmarès. Je me mets souvent à la hauteur de mon adversaire et, comme je suis à l’extérieur, je ne fais jamais une très grande différence. Mais, aujourd’hui, il y avait quelque chose au bout. On y est allé et cela a fini par payer. »
Le Girondin, lui, avait l’élégance de reconnaître sa défaite : « Je savais que Kévin allait être technique et mobile. J’ai manqué de peps et d’explosivité. Idem en ce qui concerne le cadrage. J’ai pêché physiquement. C’est de ma faute. Je n’ai aucune excuse. Kévin a été le meilleur. Je voulais rester champion pour voir plus loin. Maintenant, cela va être compliqué. C’est un gros coup d’arrêt. Je vais me remettre en question. »
 
Alexandre Terrini
 
 

 

 

 

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