Il fut une époque où la boxe connaissait des périodes fastes dans notre pays. Ainsi, à la fin de 1983, la France compte quatre champions d'Europe soit un de moins que l'Italie mais devance nettement l'Angleterre. A cette époque, Paris organise régulièrement de grandes soirées pugilistiques notamment à Coubertin mais aussi l'Elysée Montmartre ou la Porte Pouchet. Les quatre champions d'Europe sont Antoine MONTERO (mouche), Louis ACARIES (moyens), Lucien FERNANDEZ (lourds) et le tout dernier Gilles ELBILIA (welters). Il est intéressant de noter que les quatre titres étaient préalablement vacants et détenus par des boxeurs britanniques qui préféraient tenter leur chance au niveau mondial. C'était aussi l'époque bénie où la boxe avait droit de cité dans les journaux et par exemple le journal L'Equipe accordait souvent une page grand format pour une soirée parisienne. De plus, les journalistes de cette époque étaient très compétents et ils avaient pour nom Jean Marie LEBLANC (futur Directeur du Tour de France), Jean Michel ROUET et André Arnaud FOURNY qui débutait dans le métier. En dépit de cette embellie, Jean Michel ROUET demandait qu'on ne s'enflamme pas trop car la situation pouvait évoluer.
Toutefois, ce dont nous retenons surtout ce sont les déclarations de Gilles ELBILIA qui, des quatre champions d'Europe, était le moins connu médiatiquement. L'homme qui fut entrainé par le Picard Bernard DAMBROSIO savait qu'il avait moins de classe qu'un ACARIES mais disait-il, il se battait avec ses moyens. Sur un ring, ELBILIA donnait tout ce qu'il avait et faisait honneur à son sport. Après son succès face au Belge DECAESTECKER, il avait eu cette déclaration qui, aujourd'hui, pourrait encore être utilisée. ELBILIA admettait que les journalistes pouvaient le critiquer mais leur répondait-il: "Nous ne sommes que des hommes. J'accepte les remarques et les critiques quand elles sont constructives. Mais aux gens qui font la fine bouche, je leur demande: monteriez-vous sur un ring pour prendre des coups sur la gueule et recevoir des clopinettes ? La presse s'extasie sur les footballeurs, les tennismen qui ramassent des millions. Mais eux ne risquent pas leur vie, les boxeurs oui. Ce n'est pas donné à tout le monde de grimper entre douze cordes. A chacun son métier, direz-vous. Mais la boxe est-elle un métier ?" Gilles ELBILIA avait parfaitement résumé la situation. Il était boxeur professionnel mais son véritable métier était d'être employé à l' EDF. Quant à la boxe, il lui a fait, répétons le, honneur et près de trois décennies après, ses propos résonnent toujours. Chapeau encore Gilles ELBILIA pour ce que vous avez fait sur un ring.
Par Lionel HERBET